Imprimer

"Soixante dix fois sept fois..."

Écrit par Bertrand Lemaire Mardi, 02 Février 2016 00:00

Changer taille:

Tweet Enfant Prodigue

Au cours de ce paragraphe 9, le Pape insiste sur la nécessaire réciprocité miséricordieuse que Dieu attend de l’homme.

A l’image de la parabole du "débiteur sans pitié" ou de la finale du Notre Père: « pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés", Dieu nous propose d’écrire nous-mêmes les articles du code pénal par lesquels nous souhaitons être jugés à la fin de notre vie.

Le choix est entre nos mains, dans un total respect de notre liberté. Nous sommes placés sur une ligne de crête, un peu mystérieuse, entre la justice de Dieu, sa miséricorde et le respect qu’il porte à notre liberté.

Certains relents de jansénisme peuvent fausser l’équilibre nécessaire face à ce paradoxe que représentent la justice et la miséricorde.

Dieu qui prend l’initiative du pardon - un peu comme s’il s’agissait de sa propre vengeance face à l’orgueil du démon - attend de nous une réponse totalement libre, aux antipodes de la loi ancienne : "œil pour œil, dent pour dent".

Pour conclure le Pape François trouve chez saint Paul une expression qui lui est familière : "Que le soleil ne se couche pas sur votre colère". Ainsi se concrétise au jour le jour la réciprocité miséricordieuse que Dieu attend de nous.

9. Dans les paraboles de la miséricorde, Jésus révèle la nature de Dieu comme celle d’un Père qui ne s’avoue jamais vaincu jusqu’à ce qu’il ait absous le péché et vaincu le refus, par la compassion et la miséricorde. Nous connaissons ces paraboles, trois en particulier : celle de la brebis égarée, celle de la pièce de monnaie perdue, et celle du père et des deux fils (cf. Lc 15,1- 32). Dans ces paraboles, Dieu est toujours présenté comme rempli de joie, surtout quand il pardonne. Nous y trouvons le noyau de l’Evangile et de notre foi, car la miséricorde y est présentée comme la force victorieuse de tout, qui remplit le cœur d’amour, et qui console en pardonnant.

Dans une autre parabole, nous recevons un enseignement pour notre manière de vivre en chrétiens. Interpellé par la question de Pierre lui demandant combien de fois il fallait pardonner, Jésus répondit : "Je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante dix fois sept fois" (Mt 18,22). Il raconte ensuite la parabole du "débiteur sans pitié". Appelé par son maître à rendre une somme importante, il le supplie à genoux et le maître lui remet sa dette. Tout de suite après, il rencontre un autre serviteur qui lui devait quelques centimes. Celui-ci le supplia à genoux d’avoir pitié, mais il refusa et le fit emprisonner. Ayant appris la chose, le maître se mit en colère et rappela le serviteur pour lui dire : "Ne devais-tu pas, à ton tour, avoir pitié de ton compagnon, comme moi-même j’avais eu pitié de toi ?" (Mt 18,33). Et Jésus conclut: "C’est ainsi que mon Père du ciel vous traitera, si chacun de vous ne pardonne pas à son frère du fond du cœur" (Mt 18,35).

La parabole est d’un grand enseignement pour chacun de nous. Jésus affirme que la miséricorde n’est pas seulement l’agir du Père, mais elle devient le critère pour comprendre qui sont ses véritables enfants. En résumé, nous sommes invités à vivre de miséricorde parce qu’il nous a d’abord été fait miséricorde. Le pardon des offenses devient l’expression la plus manifeste de l’amour miséricordieux, et pour nous chrétiens, c’est un impératif auquel nous ne pouvons pas nous soustraire. Bien souvent, il nous semble difficile de pardonner ! Cependant, le pardon est le moyen déposé dans nos mains fragiles pour atteindre la paix du cœur. Se défaire de la rancœur, de la colère, de la violence et de la vengeance, est la condition nécessaire pour vivre heureux. Accueillons donc la demande de l’apôtre : "Que le soleil ne se couche pas sur votre colère" (Ep 4,26). Ecoutons surtout la parole de Jésus qui a établi la miséricorde comme idéal de vie, et comme critère de crédibilité de notre foi : "Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde" (Mt 5,7). C’est la béatitude qui doit susciter notre engagement tout particulier en cette Année Sainte.

Comme on peut le remarquer, la miséricorde est, dans l’Ecriture, le mot-clé pour indiquer l’agir de Dieu envers nous. Son amour n’est pas seulement affirmé, mais il est rendu visible et tangible. D’ailleurs, l’amour ne peut jamais être un mot abstrait. Par nature, il est vie concrète : intentions, attitudes, comportements qui se vérifient dans l’agir quotidien. La miséricorde de Dieu est sa responsabilité envers nous. Il se sent responsable, c’est-à-dire qu’il veut notre bien et nous voir heureux, remplis de joie et de paix. L’amour miséricordieux des chrétiens doit être sur la même longueur d’onde. Comme le Père aime, ainsi aiment les enfants. Comme il est miséricordieux, ainsi sommes-nous appelés à être miséricordieux les uns envers les autres.

Au fil de la semaine :

Si nous ouvrons la porte de notre cœur à nos frères plus petits, alors notre cœur deviendra une porte qui ouvrira sur le ciel, où demeurer pour toujours avec Dieu notre Père, avec Jésus, avec la Vierge et tous les saints.

Le Pape invite alors son auditoire à répéter avec lui par deux fois : "Qui fait preuve de Miséricorde ne craint pas la mort". Audience du 27 XI 2013


Powered by Web Agency

Textes Liés: