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Sans le pardon, la vie est inféconde et stérile

Bertrand Lemaire

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Sans le pardon, la vie est inféconde et stérile

Dans toute activité humaine, que ce soit à l’usine ou au bureau, le "règlement intérieur" figure toujours en bonne place ! Il met chacun au diapason de ce qui est bon et souhaitable pour la réussite de l’entreprise.

Le Pape François décline aussi ce "règlement intérieur" essentiel pour assurer la réussite du projet de Rédemption accompli par Jésus chez les hommes : c’est le témoignage du pardon. L’insistance se veut d’autant plus forte que notre culture moderne exècre le pardon. Que ce soit en politique ou "en affaires", le slogan de la réussite serait plutôt : "On ne pardonne plus, on tue".

En filigrane de tout pardon accordé, une dose d’humilité est souvent nécessaire. Aujourd’hui c’est considéré comme une atteinte au critère de "superman", si nécessaire à tout CV pour être pris en considération. Grâce au pardon, François, quant à lui, voit poindre l’aurore d’une vie nouvelle qui stimule le courage et l’espérance.

Le Pape ne manque pas une occasion de s’inscrire dans la ligne de saint Jean-Paul II, auteur de l’encyclique "Dives in Misericordia". Il souligne cette phrase : "La mentalité contemporaine semble s’opposer au Dieu de la miséricorde".

10. La miséricorde est le pilier qui soutient la vie de l’Eglise. Dans son action pastorale, tout devrait être enveloppé de la tendresse par laquelle on s’adresse aux croyants. Dans son annonce et le témoignage qu’elle donne face au monde, rien ne peut être privé de miséricorde. La crédibilité de l’Eglise passe par le chemin de l’amour miséricordieux et de la compassion. L’Eglise "vit un désir inépuisable d’offrir la miséricorde". Peut-être avons-nous parfois oublié de montrer et de vivre le chemin de la miséricorde. D’une part, la tentation d’exiger toujours et seulement la justice a fait oublier qu’elle n’est qu’un premier pas, nécessaire et indispensable, mais l’Eglise doit aller au-delà pour atteindre un but plus haut et plus significatif. D’autre part, il est triste de voir combien l’expérience du pardon est toujours plus rare dans notre culture. Même le mot semble parfois disparaître. Sans le témoignage du pardon, il n’y a qu’une vie inféconde et stérile, comme si l’on vivait dans un désert. Le temps est venu pour l’Eglise de retrouver la joyeuse annonce du pardon. Il est temps de revenir à l’essentiel pour se charger des faiblesses et des difficultés de nos frères. Le pardon est une force qui ressuscite en vie nouvelle et donne le courage pour regarder l’avenir avec espérance.

11. Nous ne pouvons pas oublier le grand enseignement que saint Jean-Paul II nous a donné dans sa deuxième encyclique Dives in misericordia, qui arriva à l’époque de façon inattendue et provoqua beaucoup de surprise en raison du thème abordé. Je voudrais revenir plus particulièrement sur deux expressions. Tout d’abord le saint Pape remarque l’oubli du thème de la miséricorde dans la culture actuelle : "La mentalité contemporaine semble s’opposer au Dieu de miséricorde, et elle tend à éliminer de la vie et à ôter du cœur humain la notion même de miséricorde. Le mot et l’idée de miséricorde semblent mettre mal à l’aise l’homme qui, grâce à un développement scientifique et technique inconnu jusqu’ici, est devenu maître de la terre qu’il a soumise et dominée (cf. Gn 1, 28). Cette domination de la terre, entendue parfois de façon unilatérale et superficielle, ne laisse pas de place, semble-t-il, à la miséricorde… Et c’est pourquoi, dans la situation actuelle de l’Eglise et du monde, bien des hommes et bien des milieux, guidés par un sens aigu de la foi, s’adressent, je dirais quasi spontanément, à la miséricorde de Dieu".

Au fil de la semaine :

"La première vérité de l'Eglise est l'amour du Christ". Quant à la miséricorde, "elle est l'architrave soutenant la vie de l'Eglise". Exhortant ensuite "tout le peuple chrétien, tant les pasteurs que les fidèles, à redécouvrir et opérer durant le jubilé les œuvres de miséricorde corporelle et spirituelle", parce qu’à l'heure de la mort il nous sera demandé si nous avons nourri l'affamé, donné à boire à qui avait soif. "Cette attention aux œuvres de miséricorde est importante. Il ne s'agit pas de dévotion mais de gestes concrets que les chrétiens doivent accomplir. Il faut recommencer à leur enseigner une démarche aussi importante... Dans la foi et la charité, une relation cognitive rejoint le mystère de l'amour qui est Dieu même. Tout en restant Dieu en soi, Jésus est devenu la miséricorde affective envers l'homme et pour le salut de l'humanité. La tâche confiée à votre Congrégation trouve en cela son fondement ultime et sa justification même".
Le Pape à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, le 29 janvier 2016.


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