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Pénitent en quête de pardon

Écrit par Bertrand Lemaire Mardi, 01 Mars 2016 00:00

Bertrand Lemaire

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Tweet Sacrement De La Tendresse De Dieu

Au cours du § 16, le Pape reprend le texte d’Isaïe qui contient la "règle du jeu" de toute année jubilaire.

Il décline de façon détaillée les différentes "œuvres de miséricorde". Imaginons - de façon malheureusement utopique pour notre époque - le nombre des problèmes sociaux qui seraient résolus si ces conseils de "bonne santé" étaient appliqués dans chaque nation du monde.

Suivent les enseignements de Jésus qui constituent les travaux pratiques des conseils annoncés par Isaïe. :

16. Dans l’Evangile de Luc, nous trouvons un autre aspect important pour vivre avec foi ce Jubilé. L’évangéliste raconte qu’un jour de sabbat, Jésus retourna à Nazareth, et comme il avait l’habitude de le faire, il entra dans la synagogue. On l’appela pour lire l’Ecriture et la commenter. C’était le passage du prophète Isaïe où il est écrit : "L’esprit du Seigneur Dieu est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé annoncer la bonne nouvelle aux humbles, guérir ceux qui ont le cœur brisé, proclamer aux captifs leur délivrance, aux prisonniers leur libération, proclamer une année de bienfaits accordée par le Seigneur" (Is 61, 1-2). "Une année de bienfaits" : c’est ce que le Seigneur annonce et que nous voulons vivre. Que cette Année Sainte expose la richesse de la mission de Jésus qui résonne dans les paroles du Prophète : dire une parole et faire un geste de consolation envers les pauvres, annoncer la libération de ceux qui sont esclaves dans les nouvelles prisons de la société moderne, redonner la vue à qui n’est plus capable de voir car recroquevillé sur lui-même, redonner la dignité à ceux qui en sont privés. Que la prédication de Jésus soit de nouveau visible dans les réponses de foi que les chrétiens sont amenés à donner par leur témoignage. Que les paroles de l’Apôtre nous accompagnent : "celui qui pratique la miséricorde, qu’il ait le sourire" (Rm 12, 8).

La première partie du § 17 énumère les bienfaits qui peuvent résulter de l’application des conseils évangéliques. Retenons, entre autres, les conséquences de l’accueil que nous réservons aux grâces de l’année sainte : "Alors, si tu appelles, le Seigneur répondra ; si tu cries, il dira : Me voici.". La force de l’année jubilaire nous libère de toutes nos entraves mondaines.

Dans un registre plus concret le Pape s’adresse ensuite aux confesseurs, en leur demandant de revêtir eux aussi le vêtement du pécheur : "pénitent en quête de pardon". Le prêtre n’est que le lieu de passage de ce pardon qui vient directement du Père. Ce n’est pas l’enquête sur le détail d’une faute qui compte, mais la largeur des bras qui s’ouvrent au pécheur.

17. Puisse le Carême de cette Année Jubilaire être vécu plus intensément comme un temps fort pour célébrer et expérimenter la miséricorde de Dieu. Combien de pages de l’Ecriture peuvent être méditées pendant les semaines du Carême, pour redécouvrir le visage miséricordieux du Père ! Nous pouvons nous aussi répéter avec Michée : Toi, Seigneur, tu es un Dieu qui efface l’iniquité et pardonne le péché. De nouveau, tu nous montreras ta miséricorde, tu fouleras aux pieds nos crimes, tu jetteras au fond de la mer tous nos péchés ! (cf. 7, 18-19).

Ces pages du prophète Isaïe pourront être méditées plus concrètement en ce temps de prière, de jeûne et de charité : "Le jeûne qui me plaît, n’est-ce pas ceci : faire tomber les chaînes injustes, délier les attaches du joug, rendre la liberté aux opprimés, briser tous les jougs ? N’est-ce pas partager ton pain avec celui qui a faim, accueillir chez toi les pauvres sans abri, couvrir celui que tu verras sans vêtement, ne pas te dérober à ton semblable ? Alors ta lumière jaillira comme l’aurore, et tes forces reviendront vite. Devant toi marchera ta justice, et la gloire du Seigneur fermera la marche. Alors, si tu appelles, le Seigneur répondra ; si tu cries, il dira : "Me voici." Si tu fais disparaître de chez toi le joug, le geste accusateur, la parole malfaisante, si tu donnes à celui qui a faim ce que toi, tu désires, et si tu combles les désirs du malheureux, ta lumière se lèvera dans les ténèbres et ton obscurité sera lumière de midi. Le Seigneur sera toujours ton guide. En plein désert, il comblera tes désirs et te rendra vigueur. Tu seras comme un jardin bien irrigué, comme une source où les eaux ne manquent jamais" (Is 58, 6-11).

L’initiative appelée "24 heures pour le Seigneur" du vendredi et samedi qui précèdent le IVème dimanche de Carême doit monter en puissance dans les diocèses. Tant de personnes se sont de nouveau approchées du sacrement de Réconciliation, et parmi elles de nombreux jeunes, qui retrouvent ainsi le chemin pour revenir au Seigneur, pour vivre un moment de prière intense, et redécouvrir le sens de leur vie. Avec conviction, remettons au centre le sacrement de la Réconciliation, puisqu’il donne à toucher de nos mains la grandeur de la miséricorde. Pour chaque pénitent, ce sera une source d’une véritable paix intérieure.

Je ne me lasserai jamais d’insister pour que les confesseurs soient un véritable signe de la miséricorde du Père. On ne s’improvise pas confesseur. On le devient en se faisant d’abord pénitent en quête de pardon. N’oublions jamais qu’être confesseur, c’est participer à la mission de Jésus d’être signe concret de la continuité d’un amour divin qui pardonne et qui sauve. Chacun de nous a reçu le don de l’Esprit Saint pour le pardon des péchés, nous en sommes responsables. Nul d’entre nous n’est maître du sacrement, mais un serviteur fidèle du pardon de Dieu. Chaque confesseur doit accueillir les fidèles comme le père de la parabole du fils prodigue : un père qui court à la rencontre du fils bien qu’il ait dissipé tous ses biens. Les confesseurs sont appelés à serrer sur eux ce fils repentant qui revient à la maison, et à exprimer la joie de l’avoir retrouvé. Ils ne se lasseront pas non plus d’aller vers l’autre fils resté dehors et incapable de se réjouir, pour lui faire comprendre que son jugement est sévère et injuste, et n’a pas de sens face à la miséricorde du Père qui n’a pas de limite. Ils ne poseront pas de questions impertinentes, mais comme le père de la parabole, ils interrompront le discours préparé par le fils prodigue, parce qu’ils sauront accueillir dans le cœur du pénitent l’appel à l’aide et la demande de pardon. En résumé, les confesseurs sont appelés, toujours, partout et en toutes situations, à être le signe du primat de la miséricorde.

Au fil de la semaine :

Il y a tellement de langages dans la vie : le langage de la parole, et il y a aussi les langages des gestes. Si une personne s’approche de moi, dans le confessionnal, c’est parce qu’elle sent quelque chose qui lui pèse, dont elle veut se débarrasser. Elle ne sait peut-être pas comment le dire, mais le geste est là. Si cette personne s’approche, c’est parce qu’elle voudrait changer, ne plus le faire, changer, être une autre personne et elle le dit en faisant le geste de s’approcher. Ce n’est pas nécessaire de poser des questions: "Mais tu, tu… ?" Si une personne vient, c’est parce que dans son âme elle voudrait ne plus le faire. Mais bien souvent, elles ne peuvent pas, parce qu’elles sont conditionnées par leur psychologie, par leur vie, par leur situation… "Ad impossibilia nemo tenetur" (À l’impossible, nul n’est tenu). Un cœur large… Le pardon… Le pardon est une graine, c’est une caresse de Dieu. Ayez confiance dans le pardon de Dieu! Ne tombez pas dans le pélagianisme! "Tu dois faire ceci, ceci, ceci et ceci…"

Mais vous avez ce charisme de confesseurs. Le reprendre. Le renouveler toujours. Et soyez de grands "pardonneurs", parce que celui qui ne sait pas pardonner finit comme ces docteurs de l’Évangile : c’est un grand condamneur, toujours à accuser… Et qui est le grand accusateur, dans la Bible ? Le diable ! Ou tu fais le service de Jésus, qui pardonne en donnant la vie, la prière, beaucoup d’heures là, assis, comme ces deux-là [saint Léopold et saint Pio, ndlr] ; ou tu fais le service du diable qui condamne, accuse… Je ne sais pas, je n’arrive pas à vous dire autre chose. À travers vous, je le dis à tous, à tous les prêtres qui vont confesser. Et s’ils ne pensent pas pouvoir le faire, qu’ils soient humbles et qu’ils disent : "Non, non, je célèbre la messe, je lave le plancher, je fais tout, mais pas confesser, parce que je ne sais pas bien le faire." Et demander la grâce au Seigneur, grâce que je demande pour chacun de vous, pour vous tous, pour tous les confesseurs, et aussi pour moi. Le pape aux franciscains le 9 février 2016


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