Spiritualité messianique

En première lecture, nous lisons le troisième poème du Serviteur du Seigneur, que les Pères de l'Église ont identifié à la figure de Jésus.

C'est la description de l’expérience d'un prophète dont nous ne connaissons même pas le nom. Pour lui, écouter signifie vouloir donner sa vie avec un amour tel qu’il donne tout et réclame tout. En même temps, ce serviteur place sa confiance en Dieu, en sachant qu'il ne sera pas abandonné.

Lorsque les Juifs lisent les Écritures, ils considèrent les événements du passé comme des indicateurs balisant le chemin et offrant des critères pour évaluer les événements de l'Histoire. Jésus a certainement réfléchi sur les poèmes du Serviteur et sur la tradition de sagesse du Peuple, selon laquelle le juste est méprisé, éliminé de manière injuste ; mais s'il reste fidèle, Dieu continuera son action.

Les poèmes ne faisaient pas référence explicite au Messie mais, à travers la méditation de ces poèmes, Jésus a nourri sa spiritualité messianique. Il est clair qu'il les utilise pour exprimer ses décisions : il parle de la souffrance à affronter, de la réprobation des anciens, des prêtres et des scribes. Dans les paroles de Jésus, on retrouve la volonté de continuer son chemin même face à la réprobation et au péril de mort. La tâche du serviteur est d'écouter : chaque jour il reste éveillé, à l’écoute du Père.

Le serviteur ne se plaint pas, il se tait. La souffrance, due à la prise de parole et au choix de la vie, est profondément et positivement acceptée. Le serviteur a saisi ce qu’attend le Seigneur et il accepte tout, avec une espérance et un amour plus forts que le mal qui l'entoure. Le serviteur a acquis la certitude de ne pas être déçu : Dieu est proche et va le défendre ; il n'a pas besoin de se défendre lui-même, il verra la défaite des « ennemis ». Il sait que le Seigneur interviendra et ne se laisse donc pas tenter par la violence. Nous sommes confrontés à une confiance inébranlable en l’action du Seigneur. Il y a une annonce très fine mais explicite : rien n'est plus fort que Dieu. Le serviteur, qui en a fait l’expérience personnellement, a mûri un véritable abandon et veut proclamer que Dieu triomphe du mal.

Cette figure de Jésus, Serviteur souffrant, continue d'être visible aujourd'hui à travers ceux qui témoignent de leur foi, même au prix de sacrifices, de souffrances et de persécutions impitoyables. Car tout ce qui nous entoure semble être en contraste avec le message chrétien. Où est l'amour quand tout est arrogance, quand on place hardiment les intérêts de la finance avant la croissance des gens, tandis que les pauvres et les faibles en paient les conséquences ? Où est la paix quand on ne parle que de guerre, de revendication de ses droits par la force ?