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Le jugement final (Mt 25, 31-46)

Mgr Mansour Labaky

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Extrait du Livre: "L'Evangile en Prières"

† Solennité du Christ, Roi de l’univers – année A

Le Jugement FinalSeigneur ! L’année liturgique s’achève. Désormais, tu ne parles plus en paraboles. Tu dévoiles la fresque grandiose de ton retour en gloire pour le jugement dernier. Si ton premier avènement a eu lieu dans l’humilité et la pauvreté, le second se fera dans la majesté souveraine.

Les prophètes avaient appris à Israël que Dieu jugerait son peuple. Mais, au fil du temps, les Pharisiens, sûrs d’eux-mêmes et se croyant en règle par l’observance de la Loi, s’attendaient à ce que Dieu sonne l’heure de la revanche d’Israël sur ses ennemis. Or, tu annonces que le jugement concernera tous les peuples sans distinction.

Tu révèles aussi que "le Fils de l’homme", c’est-à-dire le Messie, sera lui-même le juge suprême. Personne n’avait osé imaginer cela. Les disciples auxquels tu t’adresses ici, peu de temps avant ta Passion, ont reconnu en toi le Messie. Cette révélation doit les bouleverser.

Elle nous bouleverse aussi. Comment pourrions-nous avoir peur d’un juge qui s’est fait l’un de nous pour partager l’intégralité de notre condition humaine – hormis le péché ? C’est donc avec toute ton humanité, si proche des petits et des humbles que tu aimes avec prédilection, que tu vas nous juger! Combien de chrétiens, aujourd’hui, croient-ils au jugement dernier ? Bien peu, si l’on se réfère aux sondages.

Pourtant la vision qui se déroule sous nos yeux fourmille de détails précis. Tel un berger sépare dans son troupeau les brebis des chèvres, tu sépareras les hommes de toutes nations en deux groupes. L’un à ta droite, l’autre à ta gauche. Aux premiers, tu diras : "Approchez les bénis de mon Père…" car c’est de ton Père que vient l’élection. Ne nous as-tu pas dit que tu as tout reçu de Lui et que nul ne vient à toi si ce n’est attiré par Lui ? Ceux-là recevront en héritage le Royaume. Ce qui signifie qu’ils sont fils du Père. Quelle merveille que d’être fils de Dieu ! Y a-t-il une autre religion qui oserait rêver de cela ?

Mais que faut-il faire pour mériter une telle récompense ? Devons-nous mourir martyrs ? Réaliser des actions héroïques ? Bâtir une œuvre grandiose ? Faire de beaux discours ? Être connus, aimés, distingués ?… Non, tout cela n’est rien. La réponse, tu nous la donnes : "Tout ce que vous avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait". Tu es donc le pauvre, le petit, le malade, le méprisé ; celui pour lequel on n’a pas le temps de s’arrêter dans la course à la productivité, à l’efficacité, à la gloire ! Tes paroles me poussent à faire un examen de conscience. Il est si facile de se croire bon chrétien. Nous allons à la messe chaque dimanche, nous récitons chaque jour nos prières, nous respectons les commandements, nous faisons à l’occasion une adoration du Saint Sacrement, une retraite…

Mais dans ce programme bien organisé, laissons-nous du temps à ceux, tout proches de nous, qui auraient besoin d’un mot gentil, d’un sourire, d’une écoute ? Au voisin ou à la voisine ? À ce malade ? À cette personne âgée ? À ce prisonnier ?…
– Mais Seigneur ! Je donne chaque année pour la campagne de Carême, pour le denier du culte… J’aide plusieurs associations caritatives…
– Très bien, me dis-tu, mais qu’y a-t-il dans ton cœur pour ton prochain ? Est-ce que tu ne te laisses pas envahir par des sentiments de jalousie, par la critique, par le mépris même pour ceux qui ne sont pas de ton milieu, qui ne partagent pas tes convictions ? N’as-tu pas vite fait de juger de la situation ou du comportement des autres ? Ne rejettes-tu pas ceux que la société rejette parce qu’ils n’ont pas su s’y faire une place ?
– Je comprends, Seigneur ! La charité fraternelle résume tout. Elle est la marque spéciale de la vie surnaturelle.
En la personne de nos frères, c’est toujours toi que nous touchons. Tu es en chaque homme, même le plus défiguré par la souffrance.

Seigneur, tu es le Roi de l’univers. Non pas un roi distant mais un roi qui prend sur lui le péché du monde et qui appelle tous les hommes à le rencontrer dans la Vérité de l’Amour. Tu nous as tout donné. Tu t’es engagé jusqu’au bout, jusqu’à cette mort infâme sur la Croix, pour nous révéler combien tu nous aimes. L’humanité entière est appelée à ressusciter en toi et nous y avons notre part de responsabilité. Nous qui avons reçu la grâce du baptême, qui sommes nés dans un milieu chrétien, dans un pays libre, nous avons à faire goûter au monde ta miséricorde infinie. Nous avons à transformer cette "vallée de larmes" en fleuve de salut. Donne-nous la force de mettre nos pas dans les tiens pour que "ceux qui croisent nos visages, rencontrent en nous, Seigneur, ton image" !


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