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La prière du cœur (fin)

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La Tendresse

La tendresse

La “sainte pureté” du cœur que l’on recherche n’est pas celle d’un cristal. C’est la pureté habitée par le feu vivant de Dieu : “Donne des aliments au feu de Jésus, nous dit Jean de Dalyatha, pour que s’y enflamme la pureté de ton âme". Le buisson ardent en reste le symbole : “Je suis venu jeter un feu sur la terre, et comme je voudrais que déjà il fut allumé !“ nous dit le Christ (Lc 12,49).

C’est ce feu de Jésus, dans la mesure où nous l’alimentons, qui nous ouvrira au sacrement du frère, c’est-à-dire à la TENDRESSE.

Cette tendresse, cet “amour fou de Dieu”, les Pères vont le découvrir et le vivre à travers le thème de la “descente aux enfers” qui marque si profondément toutes nos liturgies pascales d’Orient. Comme le signale si justement Urs Von Balthasar : “Pour l’Orient chrétien, l’image de la Rédemption est la descente du Christ aux enfers, l’ouverture forcée de la porte éternelle fermée, la main du Rédempteur tendue au premier Adam qui n’en croyant pas ses yeux, contemple la lumière pascale dans les ténèbres de la mort".

Le Crucifié a pris sur lui d’être un sans-visage pour rendre à tous les damnés de la terre et à tous les sans-visage la possibilité du visage et la splendeur de l’icône. L’Evangile veut être et veut dire à tous les hommes l’annonce de cette joie. Voilà notre mission “d’éveillés” et de “ressuscités en Christ” : descendre avec lui et en lui, jusque dans l’enfer de l’homme et tout ré-ouvrir sur la lumière, la réconciliation et la tendresse, et, dans la force de l’Esprit, redonner vie aux ossements desséchés pour en faire un peuple debout, en marche (cf. Ez. 37). Seule cette tendresse divine du cœur est capable de dissoudre la raideur, la laideur et la lourdeur des cœurs et des situations les plus endurcies.

Notre monde d’aujourd’hui est plus que jamais “iconoclaste”, défigurant l’homme et le rendant “sans-visage” (“sans-visage” est l’une des façons de dire “esclave” en grec). D’où l’urgence, pour nous qui avons été saisis par l’amour sous toutes ses formes où chacun risque de devenir iconoclaste du visage de Dieu en son frère (cf. I Jn 3, 11-15). Dieu en Jésus-Christ s’est fait visage en chacun de nous. Ne défigurons pas ce visage, ni en nous, ni chez les autres.

A la lumière de ce grand mystère d’Amour, saint Isaac le syrien se demande : “Qu’est-ce qu’un cœur compatissant ?". Et voici sa réponse :

“C’est un cœur qui brûle d’amour pour la création toute entière, pour les hommes, pour les oiseaux, pour les bêtes, pour les démons, pour toutes les créatures. Si forte et si violente est sa compassion, et si grande est sa constance que son cœur se serre et qu’il ne peut supporter d’entendre ou de voir le moindre mal (ou la moindre tristesse) au sein de la création. C’est pourquoi, il prie en larmes à toute heure pour les animaux sans raison, pour les ennemis de la vérité et toux ceux qui lui nuisent afin qu’ils soient gardés, et qu’ils soient pardonnés. Dans l’immense compassion qui se lève en son cœur, sans mesure, à l’image de Dieu, il prie même pour les serpents...”.

“Tous les saints sont parvenus à une telle perfection lorsque, parfaits eux-mêmes et pareils à Dieu, ils ont répandu sur tous la surabondance de leur amour de l’homme. Tel est le signe que cherchent en eux les Saints : ressembler à Dieu en devenant parfaits par l’amour du prochain”.

Et il ajoute : “Voici, mon frère, un commandement que je te donne : que la miséricorde l’emporte toujours dans ta balance, jusqu’au moment où tu sentiras en toi la miséricorde même que Dieu éprouve envers le monde ...”.

C’est pour cela qu’Isaac se pose encore cette question : “Quand l’homme reconnaît-il dans son cœur qu’il a atteint la pureté ? Lorsqu’il considère tous les hommes comme bons, sans qu’aucun lui apparaisse impur ou souillé. Alors en vérité, il est pur de cœur”... “Heureux les cœurs purs car ils verront Dieu”, et voir Dieu, c’est aussi vivre le sacrement du frère.

“A celui dont la puissance agissant en nous, nous dit Saint Paul, est capable de faire bien au-delà, infiniment au-delà de tout ce que nous pouvons demander ou concevoir, à lui la gloire, dans l’Eglise et le Christ Jésus, pour tous les âges et tous les siècles ! Amen” (Ep 3, 20-21).


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