DANS LA FORET DE MERVENT

Après vos voyages mouvementés et cette difficile mission de Fontenay-le-Comte, vous avez le désir de vous retirer en ermite au cœur de la forêt vendéenne de Mervent. Vous connaissez bien les lieux pour avoir prêché une mission dans cette paroisse quelques mois plus tôt.

J’ai en effet grand besoin de solitude, de vie cachée, de repos physique, pour retrouver une intimité avec Dieu et avec Notre Dame. La forêt m’invite à entrer dans les sentiers secrets et à me fondre dans la nature. Avec l’accord de l’évêque et de l’intendant des finances, j’élis domicile dans une grotte où j’ai tout juste une place pour dormir, écrire et prier. Je peux jardiner, écouter le chant des oiseaux, j’y plante une croix rustique en rêvant de construire une petite chapelle. Quelques mètres plus bas, je capte l’eau d’une source pour me désaltérer.

Chaque matin je me rends à l’église pour y célébrer la messe, le reste des journées est consacré à la contemplation. Les gens du village m’apportent un peu de subsistance. Des hommes viennent avec des outils et des matériaux pour surélever le mur de la grotte afin de me préserver du vent qui s’y engouffre brutalement.

Après quelques mois de solitude, je dois reprendre mon labeur de missionnaire sur la paroisse de Vouvant. Pour la première fois deux prêtres viennent m’aider, ils constituent le premier maillon de la Compagnie de Marie à laquelle j’aspire tellement.

Je dois noter l’histoire d’une jeune fille, pourtant très pieuse, mais elle est sous l’influence du démon. Au moment où, dans l’église, je procède à un exorcisme, elle s’écrie : « Tu crois être seul avec moi, mais tu te trompes, il y a des malins dans le clocher qui veulent savoir ce que tu diras et ce que je te répondrai ». On ne tarda pas à y découvrir quelques libertins qui s’en échappent tout penauds. Je comprends que le diable veut s’amuser de moi et je me lance à fond dans cette mission, bloquée par des pécheurs scandaleux. C’est la possédée qui, en dénonçant publiquement certains de leurs crimes, provoque la conversion de plusieurs d’entre eux.

Le 28 octobre je reviens séjourner dans ma grotte de Mervent pour l’aménager avant l’arrivée de l’hiver. Ce faisant je suis visité par trois agents du roi pour une enquête administrative ! Ils finirent par dresser un long et cocasse procès-verbal constatant qu’il y avait eu « usurpation de sa Majesté… ». Ils réussirent à me faire retirer la pierre sur laquelle je voulais reposer ma tête à l’image de mon Maître ! (Extraits du livre « En haute mer »)