Rien à payer !

Entre le 600 et le 500 avant JC, tandis que le peuple d'Israël exilé, méprisé et humilié, a tout perdu, jusqu’à l’espoir, Dieu suscite un prophète pour rappeler à son Peuple que ce même Dieu, qui l’a tiré du pays d'Égypte et de l'esclavage, peut encore le libérer. Il peut le faire, parce que Lui seul est le Créateur, et il le fera, parce qu'il est fidèle et plus aimant qu'une mère.

Cet amour ne s’impose pas et l'invitation est gratuite: "Vous tous qui avez soif, venez, voici de l’eau! Même si vous n’avez pas d’argent, venez acheter et consommer, venez acheter du vin et du lait sans argent et sans rien payer". De telles paroles sont surprenantes : nous ne sommes pas habitués à ce qu’on ne nous réclame aucun dû ! Et même quand, apparemment, quelque chose nous est offert, nous savons par expérience que nous le paierons d'une autre manière, parfois à un prix beaucoup plus élevé… S’agit-il d’un conte pour enfants?

Pensons plutôt à la vie : nul ne peut en faire don à soi-même. Même les parents sont "spectateurs" du développement du fœtus dans le ventre de sa mère. Au moins, nous avons tous reçu ce don de la vie gratuitement. C'est un cadeau de chaque instant car, malgré toute l'attention que nous pouvons y porter, la vie pourrait nous être enlevée, il n'est pas en notre pouvoir de contrôler le jour de notre mort. Voici donc que ce vin, ce lait et ce pain signifient le don d’une vie pleine qui nous a été fait.

C’est pourquoi le Seigneur nous interroge: "Pourquoi dépenser votre argent pour ce qui ne nourrit pas, vous fatiguer pour ce qui ne rassasie pas?”. Que de fois nous nous pensons totalement autonomes, en nous faisant illusion sur toutes les dépendances qui nous tiennent en esclavage. Nous sommes comblés par le Seigneur et nous ne le voyons même pas, mais nous mendions l'affection et la sympathie de nos semblables!

"Cherchez le Seigneur pendant qu'il se laisse trouver" : qu'est-ce que cela veut dire? Que Dieu se laisse parfois trouver, parfois pas? Non, Dieu se laisse toujours trouver ! Tous les hommes et toutes les femmes le trouveront, pas seulement le peuple juif. Mais le prophète, au retour de l'exil de Babylone, veut dire que, si l'homme n'est pas capable d'entrer en lui-même et de se connaître, il ne pourra connaître Dieu, et sa recherche de l’Absolu restera donc vaine. Cela exige un déplacement quotidien vers l'abîme qui sépare les pensées de l'homme de celles de Dieu: "Mes pensées ne sont pas vos pensées, vos voies ne sont pas mes voies". Le Seigneur est un Dieu caché, nous sommes trop petits pour le comprendre. La seule façon de saisir Dieu est de devenir sien.

“La pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer, pour donner la semence au semeur et le pain à celui qui mange; ainsi ma parole, qui sort de ma bouche, ne me reviendra pas sans résultat, sans avoir fait ce que je veux, sans avoir accompli sa mission”. La Parole est créatrice: "Que la lumière soit !". La terre ne pourra pas retenir la pluie car l'incrédulité et l'opposition humaine n'empêchent pas la Parole de triompher de tous les obstacles et de porter les fruits attendus. La Parole révèle à quel point Dieu est attentif, compréhensif et indulgent envers la faiblesse et la fragilité de ses créatures.

Aujourd'hui, la fête du Baptême de Jésus célèbre l'entrée de l'Infini dans le fini, sans que l'Infini ne soit emprisonné pour autant. L'homme ne fait pas toujours attention à cette réalité. C'est pourquoi le Seigneur répète: "Assoiffés, voici de l'eau. Prêtez l’oreille! Venez à moi! Écoutez, et vous vivrez". Alors que nous avons besoin de trouver du sens et des conseils, nous ne nous abreuvons pas à la source authentique mais nous cherchons ailleurs et en vain.