ImprimerEnvoyer

LE TRAVAIL DU DIMANCHE

Bertrand Lemaire

Changer taille:

Le Travail Du Dimanche

Que pensez-vous du travail du dimanche ? Avez-vous été confronté à ce problème de société ?

« De mon temps », on ne se posait jamais ce genre de question ! Personne ne travaillait le dimanche, cependant le problème a surgi exceptionnellement dans la région de la Chaize à propos d’un jour férié, celui de l’Ascension.

Je venais de prêcher quelque temps au paravent une longue et fructueuse mission dans cette paroisse et il m’a semblé judicieux de remettre en cause certaines routines qui me semblaient fâcheuses. Depuis des temps immémoriaux se déroulait ce jour-là une foire considérable qui attirait une foule très importante. Les cérémonies de la fête de l’Ascension en étaient fort perturbées.

A l’occasion d’un de mes passages dans cette paroisse, je me mets à dénoncer fermement en chaire, un dimanche matin, la tenue de cette foire comme s’opposant à la sanctification de ce jour de fête et je propose qu’elle soit déplacée au lundi suivant.

Comme vous pouvez l’imaginer, l’opposition se met en branle ! Se sentant lésé, le percepteur des droits de place pousse des grands cris, plusieurs de mes confrères, plus ou moins jaloux, me critiquent publiquement, les moines voisins prédisent des affrontements et ils sont certains de l’échec de cette initiative !

Je tiens bon et les paroissiens, d’abord réticents, finissent par me faire confiance, ils avaient pris de bonnes résolutions pendant la mission.

Il est vrai qu’on ne modifie pas impunément des habitudes collectives de ce genre...

D’autant plus que les jours passent et de nombreux marchands se sont déjà mis en route pour la grande foire de l'Ascension au pays de La Chaize ! Ils n’étaient pas tous au courant du changement de date. De grand matin le jour de la fête, les voilà qui arrivent après une longue route et comptant sur les gains de la journée pour vivre ou payer leurs dettes.

Seul, je pars à leur rencontre et m’adressant à eux, je leur dis : « Mes chers enfants, ne profanez pas le jour du Seigneur, Il vous en tiendrait rigueur. Si vous avez besoin d’argent, je vous le donnerai, mais retournez chez vous … »

Je finis par empêcher l’assemblée de se former. Seuls deux paysans s’obstinèrent à rester sur le champ de foire. Et ils procédèrent ensemble à la vente et à l’achat d’une vache. Mais le jour même le vendeur perdit le montant de sa vente et l’acheteur fut surpris de voir sa bête dépérir rapidement. Il tomba lui-même perclus de ses membres. Quant au collecteur d’impôts qui m’avait insulté il fut atteint d’un mal mystérieux. Enfin le procureur de l’abbaye fut frappé d’un ulcère incurable.

De ces différents côtés, on est venu me demander d’intervenir pour calmer cette vengeance divine, j’ai prié pour cela et tout rentra dans l’ordre, mais chacun comprit que la foire de La Chaize se déroulerait maintenant le lundi suivant. (Extraits du livre « En haute mer »)


Powered by Web Agency